En poursuivant un pélican (qui porte en son bec quelque chose de mon intérêt), je me retrouve stoppé par un gigantesque ravin que l'oiseau surmonte lui, sans difficulté. Sur l'autre bord se ramifie une ville de grande ampleur, qui m'apparaît minuscule à cause l'éloignement. Il existe heureusement un pont pour y accéder qui du reste, par les sortes de guérites qu'il porte, évoque sans peine le Ponte Vecchio de Florence. Il n'en diffère d'ailleurs que par la taille, adaptée à celle du ravin qu'il enjambe, ainsi que par une architecture et une facture moderne.
J'entreprends la traversée, sans doute dans le dessein de chopper cette saloperie de pélican qui sur le moment m'énerve puissamment. Malheureusement les dieux ont toujours soif, n'en n'ont jamais assez, et c'est ainsi que je me retrouve bloqué une nouvelle fois, par une énorme brèche au milieu de la construction. Cela ressemble à une fracture "naturelle" : la cassure n'est pas nette mais au contraire quelques blocs de macadam pendent, pitoyablement accrochés aux tiges métal qui renforçaient l'édifice. Bon. Je m'assois au bord du trou, sur une des écailles produites par le froissement du béton, et attends. Je suis un peu dépité, quoi que plus proche de la perplexité que de l'effondrement moral. Je crois même qu'à ce moment, je ne songe plus à l'oiseau.
C'est une femme noire, en robe de soirée rose pétillant, qui me sort de mes pensées. Elle arrive, ses talons hauts à la main pour ne pas se viander, avec la ferme intention de s'entretenir avec moi. Effectivement, elle que je ne connais ni d'Ève ni d'Adam, commence brusquement à me parler de la peur du vide. La pauvre est terrifiée par la vue du précipice, mais je parviens quand même à la rassurer avec mes mots, non sans perdre quelques plumes, car à la fin de la discussion c'est moi qui commence à avoir peur de tomber !
Elle finit par repartir, sans ses chaussures. Elle les a oubliées et moi, dans mon infinie galanterie, je ne songe même pas à lui courir après pour les lui rendre... (Le sommeil me rend hideux). Bon, il ne faut pas déconner, je sens la peur qui mâche mon ventre : il faut que je retourne sur le plancher des vaches avec de me liquéfier. Je reviens sur mes pas, et traverse de nouveau ces espèces de "guérites". Elles sont vides et poussiéreuses, comme en chantier. Il y a d'ailleurs des bâches transparentes pour couvrir quelques fenêtres brisées, ce qui renforce la qualité l'antipathie de l'atmosphère. Le soleil qui filtre à travers ces bâches rampe mollement sur le sol, projetant une lumière jaune fade.
C'est dans ce climat glauque qu'arrive un type qui me ressemble vaguement. Il accourt vers moi en hurlant et en battant des poings dans le vide ! Commence alors un matraquage en règle, digne des plus grandes daubes du cinéma américain : vas-y que je te frappe, coup de genou, coup de coude...
Pendant ce combat acharné, je me souviens assez inopinément d'une anecdote à propos du pont. (Elle me revient comme un conseil de maman du genre ; "met ton manteau avant de sortir".) Il se trouve que cet ouvrage d'art moderne ( Je n'ai plus de synonyme de "pont", et je t'emmerde) fait l'objet d'un vide juridique. Effectivement, on peut y commettre un meurtre sans s'exposer à des poursuites judiciaires ! Ce souvenir ne m'arrange pas vraiment, car je commence à comprendre que ça sera lui ou moi à la fin de l'escarmouche...
La bataille gagne en vivacité et dans notre engouement belliqueux, nous nous rapprochons de plus en plus de la terre ferme. Au bout d'un temps qui m'apparaît affreusement long, je finis par avoir le dessus sur mon assaillant et parviens à le tuer. Mais ironie du sort, dans la débâcle je suis sorti du pont sans m'en rendre compte et j'ai tué l'inconnu quelques mètres plus loin dans l'herbe.
Les pandores arrivent bien vite pour me mettre à l'ombre.
Désir latent |
Bienvenue parmi nous Pelagos.
Bravo, ce rêve est superbement décrit.
Bienvenue Pelagos, et merci pour ton premier rêve !
Excuse moi du retard pour l'avoir lu, par contre !
J'aime beaucoup ton vocabulaire (La petite référence à Brassens aussi).
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