Face à moi, il y a un escalier en bois. Du haut de cet escalier, je me laisse tomber en avant et mon corps se suspend à quelques centimètres des marches. Il glisse sur l’air en suivant la pente de l’escalier jusqu’à la porte ouverte. C’est comme ça que je prends mon envol ; les bras le long du corps.
La campagne au dessous est resplendissante et la maison de mes parents de plus en plus petite. Je rends visite au pendu, aux habitants du village de Perry, je passe par dessus la colline, par dessus les forêts, je suis le lit de la rivière qui serpente jusqu’au Chambon où les canoéistes préparent leurs barques. J’aimerai que les gens voient ce dont je suis capable, mais personne ne me remarque.
Je vole longtemps avant d’atterrir déposée par le vent sur le boulevard d’un film américain. Personne ne m’a vu et je marche parmi les piétons en me demandant s’il m’est déjà véritablement arrivé de voler. Je m’arrête au milieu de ce boulevard et j’ai soudain besoin d’en avoir le cœur net. Je ne prête plus attention à ceux qui vont et viennent, j’inspire à fond en prenant le temps de bien considérer l’angle de la rue.
« Il suffit d’y croire. » Il me semble que c’est la formule.
Je me laisse donc tomber en avant et mon corps se suspend à nouveau à quelques centimètres du sol. Il ne tient qu’à moi d’avancer, c’est à moi d’être convaincu que je peux voler. J’avance lentement à hauteur des têtes et je suis surpris de réaliser que les gens me voient cette fois-ci. Ils constatent que j’ai réussi et je ne lis dans leurs yeux aucun étonnement. Il y a dans ces regards quelque chose qui reconnait la concrétisation d’un progrès humain attendu.
A me voir voler, ils comprennent d’un coup comment ça fonctionne et je les vois se laisser tomber par derrière, par devant, sur les côtés, ils tombent comme ils peuvent et leurs corps se suspendent dans des positions toutes différentes. Je suis amusé de les voir s’essayer d’abord maladroitement, puis je découvre une diversité incroyable de façon de voler. Il y a des gens qui nagent, des gens qui font des bonds gigantesques, des gens qui partent comme des fusées, des gens assis sur des coussins d’air, des gens qui s’élèvent en tenant des ballons, des gens qui vont de nuages en nuages.
Chute de ma soeur | Le Bois Charmant |
Très sympa ! J'aime beaucoup le côté didactique, tous les gens qui découvrent qu'ils peuvent aussi voler.
Ça me donne des idées supplémentaires pour voler en rêve lucide... même si j'aime bien mes ailes de ptérodactyle !
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